Déjà 19. Encore combien de samedis les commerçants des centres villes des métropoles hexagonales devront-ils subir l’impact des gilets jaunes et des casseurs ? Les chambres de commerce et les médias – deux corporations de l’ancien monde taclées par le pouvoir, mais qui servent encore à quelque chose – alertent sur une situation devenue explosive pour les boutiques, bars, restaurants ou hôtels des grandes artères. En premier lieu, le secteur des Champs-Elysées à Paris. 15 000 personnes y travaillent. Depuis quatre mois, des commerçants ont perdu entre 30 à 40 % de chiffre d’affaires. Mais le désastre touche aussi d’autres villes. Les réseaux consulaires s’inquiètent d’un changement de comportement, à terme, des consommateurs, même une fois le mouvement de contestation terminé. « Les gens se sont habitués à éviter les centres villes les samedis après-midi, et à fréquenter d’autres lieux. Reviendront-ils plus tard ? Rien n’est moins sûr », analyse une source proche.

Comble de l’absurde, les victimes des gilets jaunes sont des gens qui leur ressemblent : des petits commerçants, des travailleurs au Smic, des classes moyennes. Les cibles presque invisibles du mouvement restent finalement hors d’atteinte. Qu’il s’agisse du capitalisme financiarisé, de l’évasion fiscale ou des parachutes dorés et abhorrés, comme le dernier en date, celui de 14 millions d’euros, attribué à Thierry Pilenko, président du groupe pétrolier TechnipFMC, alors que l’entreprise enregistre des pertes. Et alors que cet ingénieur, certainement talentueux et chevronné, n’a jamais, à l’instar de la plupart des dirigeants des grands groupes, créé sa propre entreprise, avec les risques afférents. Le patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, et le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, ont presque enfilé à leur tour un gilet jaune, pour clouer au pilori le montant de cette prime. L’indécence d’une telle indemnité dessert en effet les efforts – réels – que l’Etat et l’organisation patronale fournissent pour faire enfin aimer, une bonne fois pour toutes, le business et l’entrepreneuriat en France.

On n’en est plus à une contradiction près. D’un côté, une tendance sociétale forte au lissage des propos. Prenez les relations de bureau. Avant, on se foutait sur la gueule joyeusement avec ses collègues, m’a-t-on raconté, puis on allait prendre l’apéro pour se réconcilier en se disant que quand même, on y a été fort, les murs ont tremblé, hein. Et dans ces moments-là, une mousse à la main, les bonnes idées germaient. De telles scènes semblent inimaginables aujourd’hui. Evolution certes plutôt positive, car la violence verbale ne saurait être la règle. Mais admettons-le : on ne peut plus rien dire.

En même temps, sur la plus étrange avenue du monde, ou ailleurs, on admet que les forces de l’ordre soient attaquées, encerclées, caillassées. Le mouvement de sympathie dont la police et la gendarmerie ont bénéficié pendant les attentats de 2015 et 2016 aura été de bien courte durée. Aujourd’hui, on (pronom indéfini) laisse perdurer des manifestations qui s’apparentent davantage, au fil des semaines, à des provocations répétées, et abîmant durablement l’image de la France. Pourquoi ? Est-ce délibéré, ou subi ? A qui profite, au final, la situation ? Mes conclusions : verdict dans les urnes, le 26 mai (élections européennes), et surtout, vivement l’été !