Alors que la fiscalité écologique enflamme le tour de France des gilets jaunes, et que les bobos des villes se ruent fébrilement sur les étals vegan, une question fondamentale et pleine d’un doute tout journalistique : qu’est-ce que l’écologie, au juste ?

Rouler en voiture électrique ? La belle affaire : les éléments qui la composent ne valent pas mieux qu’un vieux diesel. Et, accessoirement, on ne sait toujours pas quoi faire des déchets nucléaires. Regardez l’inextricable complexité du futur site d’enfouissement des déchets radioactifs à Bure, dans la Meuse. Manger bio ? C’est sain, mais très cher. Et là encore, sujet à caution : des produits bio peuvent avoir parcouru le tour du monde. Réduire sa consommation d’énergie, en rénovant les logements anciens notamment ? Une priorité absolue, fixée par Nicolas Hulot lorsqu’il était aux affaires. Mais au niveau de l’acte constructif, la filière peine à se structurer, et les propriétaires à investir. Se déplacer moins, dans une forme de frugalité des transhumances ? On n’en prend pas le chemin. La Chine construit frénétiquement des dizaines de méga-aéroports et recrute des pilotes à tour de bras. Le trafic aérien mondial explose. Et, au sol, les mobilités explosent. Mettre en place des péages urbains ? Oui, a dit le gouvernement, et finalement non, a dit le gouvernement. Promouvoir l’économie du recyclage ? Le cabinet de la secrétaire d’État Brune Poirson s’y évertue à longueur de tweets. Mais les emballages individuels pullulent, épousant les nouveaux modes de vie – célibataires, familles monoparentales etc – et les smartphones, ordinateurs et data center ne laisseront pas un héritage neutre. Heureusement, des initiatives, souvent menées à l’échelon local, par les collectivités, des PME, des grands groupes ou les acteurs de l’économie sociale et solidaire, méritent d’être soulignées. Des citoyens se bougent. Il faudra quand même – toujours ce doute journalistique – mesurer les actions concrètes réalisées dans le cadre de chartes signées il y a trois ou quatre ans.

On retiendra la définition, remontant à 1987, du développement durable : « Le développement durable répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs » (extrait du rapport Bruntland). Les générations futures (traduisons : nos gosses) devront affronter des crises majeures. Moins en Europe qu’ailleurs, certes, mais pensons global. Tempêtes. Inondations. Elévations du niveau des mers. Migrations (et ce n’est qu’un début). Guerres de l’eau et de l’énergie. Réchauffement climatique. Biodiversité décimée. Surpopulation. Mégalopoles devenues folles. Pics de pollution. « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », disait Jacques Chirac en septembre 2002. Seize ans après, et malgré les rapports de plus en plus alarmants du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), rien de neuf. Les climato-sceptiques gagnent même du terrain, à la tête de pays majeurs – Brésil, États-Unis. Ce n’est pas une bonne nouvelle, et je n’ai pas envie de conclure autrement.