Ce mercredi matin, la démocrate Hillary Clinton, 69 ans, devrait être élue présidente des Etats-Unis, sauf attaque des Martiens dans le money time. Les médias du monde entier attendent, en mode charognard, la victoire au finish du Républicain Donald Trump, « mélange unique de racisme, de sexisme, de protectionnisme, de xénophobie et d’incompétence autoritaire », comme le résume justement Dominique Moïsi, professeur au King’s College de Londres et auteur de la tribune « Hillary, le seul choix possible », ce lundi dans Les Échos. Ils l’attendent, non pas parce qu’ils désirent un hold-up de Trump, mais parce que si ce dernier se produisait, il susciterait des dizaines de millions de clics sur les sites d’information – ou « vendrait du papier », comme on aurait dit avant, en 2005.

Sauf qu’on parle quand même de la première puissance mondiale. Au terme d’une campagne stupéfiante de médiocrité, digne d’une mauvaise série télé – avant-goût probable de ce qui nous attend au printemps en France -, le moins repoussoir des deux candidats à la Maison-Blanche l’emporterait donc. Avec à peu près tout à faire, notamment auprès des Blancs de la classe moyenne, se sentant exclus, en régression et aigris. Avec à peu près tout à faire, comme une campagne après la campagne, tant est grand le niveau de défiance et d’impopularité à son égard. À tel point, d’ailleurs, que Barack et Michelle Obama se sont employés ces derniers jours, en experts de la communication politique, pour voler au secours d’une Clinton plus tout à fait certaine d’emporter tous les swing states-clé (Arizona, Floride, Nevada, New Hampshire, Caroline du Nord et Nebraska), selon certains sondages.

On en oublierait presque que, huit ans après l’élection d’un président noir à la Maison Blanche, un moment historique nous attend : pour la première fois, une femme serait élue présidente de la plus grande démocratie mondiale. Entre Christine Lagarde au FMI, Angela Merkel en Europe (pardon, en Allemagne), Janet Yellen à la FED (Réserve Fédérale Américaine) et, donc, Hillary chez l’Oncle Sam, on va finir par devoir créer une journée des mecs le 8 mars prochain.

On en oublierait presque que le rêve américain a sa part d’ombre. Avec son suffrage indirect compliqué (le ou la président-e n’est pas élu-e par le peuple, mais par des grands électeurs), il est possible de gagner l’élection présidentielle sans remporter la majorité des voix. Ce qui fut le cas du Républicain George W.Bush en 2000, opposé à Al Gore. Par ailleurs, du fait d’une organisation archaïque des bureaux de vote, New York, pourtant symbole universel de modernité, affiche l’un des taux de participation les plus bas du pays. Enfin, aux Etats-Unis, le droit de vote n’est pas automatique. Il requiert des démarches préalables souvent contraignantes et arbitraires (interdiction de voter pour les anciens prisonniers, interdiction du vote anticipé, fermeture de bureaux de vote, demande de papiers pourtant non-obligatoires…), comme au Mississipi, au Kansas, en Alabama, au Texas, en Arizona ou en Caroline du Nord, frappant les minorités souvent vulnérables, selon plusieurs organisations non-gouvernementales.