Thierry Roland aura raté ça : les socialistes français se retrouvent ce matin avec tous les pouvoirs. Vu le taux d’abstention record, cette majorité absolue au Palais Bourbon n’est que relative, rapportée au nombre d’inscrits. Reste que depuis la baffe du 21 avril 2002, la gauche a su regagner presque toutes les élections clés : régionales en 2004 et 2010, « Non » au projet de constitution européenne en 2005, municipales en 2008, sénatoriales, présidentielle et législatives en 2012, et les cantonales, dont personne ne comprend à quoi elles servent, mais qui se tiennent en permanence. Même la défaite de 2007 face à Nicolas Sarkozy fut positive, car débriefée. En 2007, le PS ne supportait pas (dans les deux sens du verbe ‘supporter’) sa championne, c’est ballot. En 2012, tout le monde était en rang d’oignons derrière Flanby. Décidément, Hollande et Royal resteront liés dans l’histoire, au-delà de leur histoire personnelle.
La droite mettra-t-elle, elle aussi, dix ans, pour retrouver les clés du pouvoir ? Son congrès national, cet automne, sera à ce sujet décisif. De vraies questions l’émailleront : où mettre le curseur vis-à-vis du Front national ? Faut-il barrer à droite toute, en continuant à faire ‘la République buissonnière’ (Patrick Buisson, conseiller ‘frontiste’ de Sarko) ? Ou, au contraire, manœuvrer pour récupérer l’électorat centriste, orphelin aujourd’hui ? Faut-il valoriser les réformes économiques et sociales Sarkozy (Hollande en remet peu en cause) ou se tourner vers l’avenir ? Comment résister à la guerre des Trois (Fillon, Copé, Juppé) pour dégager un leadership clair ?
La réalité économique du moment pourrait aider l’UMP sur le chemin de la reconquête. Le pire ennemi de la gauche devient … la gauche. En étant pleinement investi par le peuple, le PS devient en effet totalement responsable. Ce qui n’est pas un cadeau, surtout vu la conjoncture. De plus, à l’heure des tweets semi-royaux, des passions jetables et des super crises, la plupart des citoyens sont prêts à changer de crèmerie comme de chemise. Ségolène Royal, François Bayrou et Marine Le Pen, tous trois battus hier soir après avoir mené avec un certain brio la bataille de France en 2007 et/ou 2012, ne diront pas le contraire.