Cécile Duflot, 38 ans, ministre de l’égalité des Territoires et du Logement, manoeuvre en habile politique. A un mois des élections municipales, en soutenant publiquement les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, elle remet sur le devant de la scène médiatique un thème cher au parti écologiste, qui présente de nombreux candidats dans les 36 000 communes, et dont elle fut la secrétaire nationale de 2006 à 2012. Bien joué. Avec cette polémique, Duflot nargue le chef du gouvernement – son patron – sur ses terres, et sur ses convictions – Jean-Marc Ayrault a défendu avec vigueur « l’Ayraultport », lorsqu’il était maire de Nantes.

Soutenir des gens opposés à un gouvernement dont on fait partie, surfer, avec son improbable copain, sur les privilèges du maroquin (salaire à vie, appartement de fonction, frais de bouche, grands crus…), c’est fort de café. Un ministre se tait ou démissionne, selon l’expression. Lors de la 1ère guerre du Golfe, Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de la Défense, et opposé à l’entrée de la France dans le conflit, n’avait-il pas rendu son tablier ? Idem pour Jacques Chirac, qui quitta bruyamment Matignon en 1976, pour pouvoir mieux exécuter, cinq ans plus tard, Valéry Giscard d’Estaing.

Mais ça, c’était avant, à l’époque où les voyous marseillais parlaient d’honneur, et où la politique se consommait saignante. En 2014, notre président casqué a besoin du groupe écologiste à l’Assemblée pour conserver sa fragile majorité. Cette immunité permet bien des écarts à la trentenaire mal élevée, d’autant plus que le fusible Batho* a déjà sauté. Une femme évincée, ça va ; deux, bonjour les dégâts les gars. Et ça, coquinette le sait.

Il y a quand même un point où Cécile fait Duflop : ce pour quoi elle est payée. La France a rarement construit aussi peu, alors que le pays manque de logements. Le dispositif de défiscalisation, qui porte son nom, fait fuir les investisseurs, las d’être insultés à longueur de Libé. Cet automne, les bonnets rouges ont eu raison de la verte écotaxe, qui n’est certes pas de son ressort, mais de ses combats. Dans « sa » loi ALUR (accès au logement et à un urbanisme réformé), l’incompréhensible GUL (garantie universelle des loyers) ne s’appliquera qu’en 2016. Et le dispositif d’encadrement des loyers donne déjà des cheveux gris aux préfets, aucun observatoire des loyers n’existant à ce jour. Mais tout ça n’est rien par rapport à sa garde-robe. Mme la ministre se fringue comme un sac, et sur les photos elle semble en être très fière !

* Delphine Batho, ex-ministre socialiste du gouvernement (Ecologie), relevée de ses fonctions le 2 juillet 2013 suite à un désaccord sur la politique budgétaire.