… déclare habilement (« c’est la faute à la crise ») Hollande le 31 août. Mais qu’est-ce qu’une crise, au juste ? Tout est relatif. Il y a la perception que l’on a, ou que l’on donne, d’une situation, et la réalité de la situation elle-même. Depuis 1960, la France perd en moyenne un point de croissance par décennie. Il est vrai que nous partions de loin, avec, à l’époque, un pays en pleine (re)construction. Les besoins en bras ont ensuite décru et le moteur, mécaniquement, a tourné moins vite. Cette croissance un brin volage se donne à d’autres pays – Chine, Brésil, Inde… -, qui veulent à leur tour l’accès au progrès, à la modernité et au confort – doit-on le leur reprocher, nous qui leur vendons sans relâche notre propre modèle et nos propres produits/services. La phase de semi-récession dans laquelle pénètre l’Europe est définitive. Nous ne sommes donc pas en crise, mais entrons de plain-pied dans un monde nouveau, à définir, affronter et inventer ensemble.
Ce n’est pas pour autant, loin s’en faut, la fin de tout. Nous héritons d’un cadre solide : éducation et système de santé qualitatifs, droits sociaux (cf ci-dessous), liberté d’expression, prévalence de l’Etat de droit. Par ailleurs, l’ère de la croissance molle va permettre de rebattre les cartes du libéralisme : une augmentation ininterrompue de l’activité est-elle possible, souhaitable ?
Ce n’est pas la fin de tout, car le pouvoir d’achat, devenu cause nationale, n’est pas en baisse, mais en constante augmentation. Ce n’est pas la fin de tout, parce qu’aucun garde-fou (CMU, RSA, RTT, Smic, indemnités chômage…) n’est remis en cause. Les salaires des fonctionnaires et les pensions de retraite ne sont pas diminués. La hausse de l’allocation rentrée, qui sera au quinquennat de Hollande ce que le bouclier fiscal fut à celui de Sarkozy – un péché démagogique, partisan et anti-républicain -, partira dans l’achat d’écrans plats, smartphones et autres biens de première nécessité.
Il y a bien crise, me direz-vous, puisque la barre des trois millions de demandeurs d’emploi est franchie. Mais les erreurs qui expliquent en grande partie le chômage de masse – absence quasi totale d’orientation aux collège/lycée et de flexibilité dans l’organisation sociale du travail, dénigrement des formations techniques et professionnelles, charges excessives pesant sur les entreprises… – sont trop grossières et persistantes pour ne pas être voulues sciemment. Même si je n’ai toujours pas compris à qui profite le crime.