Ainsi a parlé Claude Guéant, ministre de l’Intérieur de la République française, parti depuis en session de rattrapage aux Antilles. Déjà, en 2007, son boss proclamait à Dakar : « L’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. » Entre 1939 et 1945, par la folie d’un peintre raté et la complicité de fonctionnaires zélés, six millions de juifs ont été gazés, pillés, déportés, parqués. Les deux conflits mondiaux (plus européens, tu meurs) ont causé la mort de dizaines de millions de soldats et civils, pour autant de veuves et d’orphelins. Avant d’être une gentille arme de dissuasion, la bombe atomique a été larguée sur les femmes et les enfants de deux villes japonaises – c’était des jours d’été. Il n’y a pas si longtemps, nous avons planifié la traite des Noirs, lancé des croisades de haine, guillotiné des innocents, massacré les Indiens d’Amérique, les Aborigènes d’Australie, les Incas du Pérou. Les Algériens ? Secret défense.
Aujourd’hui ? Bien sûr, nous défendons tous les vagues et consensuelles « valeurs universelles des droits de l’homme ». Qui est contre l’Etat de Droit face à la violence des mafias, contre l’accès à l’éducation et aux soins médicaux, contre le respect des minorités ethniques et religieuses ?
Et pourtant. Nos anciens sont perçus comme des vieux qui coûtent. Les femmes restent, pour beaucoup, des plantes vertes tout juste bonnes à faire vendre des bagnoles au Salon de l’Auto ou dans les spots de pub – elles sont les premières responsables de cette image dégradée. Nous consommons 26 fois plus qu’il y a 150 ans. Cela ne nous rend pas très heureux : nous sommes pessimistes et individualistes, et gobons des anxiolytiques et antidépresseurs comme des bonbons. Nos démocraties se meurent, plombées par l’abstention et l’extrémisme. Notre bilan carbone, rapporté par individu, est un désastre. Les plus riches d’entre nous sillonnent les quatre coins de la planète, toujours et encore, plus pour marquer leur classe sociale que par vraie soif d’ailleurs. Les Français raffolent de la San Pellegrino et les Italiens du Perrier – ça enrichit l’exploitant du Tunnel du Mont Blanc. Nous laissons aux prochaines générations l’urgence environnementale en pâture. Dans deux cent ans, pour sûr, nos arrières-arrières petits-enfants nous traiteront de barbares à lunettes. Oui, vraiment, toutes les civilisations ne se valent pas.