Quel est le contexte macroéconomique actuel ? Mi-septembre, une conférence* autant feutrée que dense a réuni, au Domaine de Verchant à Castelnau-le-Lez (Hérault), Valérie Plagnol, économiste, membre du Haut Conseil des Finances Publiques, et Thibaut Cossenet, directeur du développement au sein du Groupe Le Conservateur (gestion de patrimoine). Toujours instructif de se frotter à ces analyses certes un peu froides, mais éclairantes.

Pour Valérie Plagnol, à l’échelle internationale, la situation se caractérise par une accalmie, « et de moindre risque », avec des écarts faibles entre les rendements obligataires américains et allemands. Les prévisions de croissance mondiale sont revues à la hausse (+ 3,5 %), l’économie s’inscrit dans une phase d’accélération et d’expansion, malgré une stabilisation de la croissance chinoise – « On s’interroge sur le caractère dirigiste de cette économie », souligne l’experte. Le Brésil et la Russie sortent d’un « violent trou d’air, amorcé en 2013 ».

L’économie européenne traverse une phase euphorique. « Les ménages européens se sentent mieux, du fait de la baisse spectaculaire du taux de chômage. » Mais les taux d’intérêt, certes historiquement bas (« ils n’ont jamais été aussi bas depuis le début de l’ère moderne financière », insiste Thibaut Cossenet), doivent être rapportés aux dettes publiques : « Quand la dette représente 130 % de la richesse annuelle, ces 2 % coûtent très cher. C’est ce qui se passe en Italie. L’accalmie observée traîne néanmoins le poids du passé, certains pays étant plus concernés que d’autres. »

Alors que les événements imprévisibles se multiplient (Brexit, élections de Trump et Macron, tensions entre les Etats-Unis et la Corée du Nord), l’indice Vix (dit « l’indice de la peur »), qui mesure la volatilité des marchés, réagit peu. « Les marchés ne semblent plus avoir peur de grand chose », résume Valérie Plagnol. Les marchés ne semblent pas croire à l’utilisation de l’arme atomique par tel ou tel pays. « C’est perçu comme inconcevable. Nous restons dans l’équilibre de la terreur. »

Autre paradoxe : les vrais chiffres du chômage aux États-Unis. Le taux de chômage n’est que de 4,4 %, mais le taux de participation n’est, lui, que de 62,9 %. « Ce taux avait fortement baissé au moment de la crise, et ne se redresse par malgré la reprise de l’activité. Il semble qu’une partie de la population soit sortie définitivement du marché du travail. » Toujours aux États-Unis, « le nouveau président américain ne peut pas tenir ses promesses. Il n’a pas l’administration pour, il ne dispose des moyens ni techniques ni politiques, pour agir, bien qu’ayant la majorité républicaine au Congrès », car celle-ci est en désaccord avec sa politique – faire des économies pour donner des baisses d’impôts. En outre, la politique « de fermeture et de repli sur soi des Etats-Unis déstabilisent la construction et l’agriculture, qui accueillent beaucoup de travailleurs étrangers ». Enfin, aux tensions avec la Réserve Fédérale (Fed), s’ajoute la question de la succession de l’actuelle patronne, Janet Yellen, dont le mandat arrive à son terme début février.
Décidément, l’équilibre du monde ne passe pas par la case Europe. « Jeff Bezos (patron d’Amazon, NDLR) ne sait même pas où est la France sur la carte. C’est d’ailleurs un vrai problème pour ses équipes européennes », me confiait vendredi un promoteur spécialiste de l’immobilier d’entreprise.
* Parrainée par Les Échos.