Chutent les feuilles des arbres, le moral des passants et les courbes de popularité du couple Hollande/Ayrault. Pavés humides, heure d’hiver (une invention des marques d’antidépresseurs), fin d’année. Et pour plomber le tout, la Toussaint, hymne aux défunts. Avec son art du tempo, c’est la période à laquelle Georges Frêche, boulimique et bouillant politique (tour à tour maire de Montpellier, député, président de l’agglo et de la Région Languedoc-Roussillon), nous a quittés. Il y a deux ans. Un dimanche soir… Jusqu’au jour de sa mort, il aura joué avec les journalistes. Aujourd’hui, et c’est moins un hommage qu’un constat, le souffle du boss du Sud est toujours vivant. La future gare TGV Montpellier Odysseum, qui sera inaugurée le 8 octobre 2017 (si si), c’est lui ; Le bouclage financier du futur contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier (fin 2017 également), c’est lui ; le réseau de quatre lignes de tramway, c’est lui ; le projet « EcoCité, de Montpellier à la mer », labellisé par le Ministère de l’Ecologie et qui projette 15 000 nouveaux logements à l’horizon 2030, c’est encore lui.
Voilà pour l’exemple politique, mais cela vaut aussi dans l’intime. Les morts guident nos pas et nous venons d’eux – de leurs chairs et de leurs idées. On a tous des morts copains, qui nous murmurent des conseils à l’oreille. Il y a aussi des morts farceurs, qui semblent revenir en flash au coin d’une rue, sous les habits d’un autre. Ou des morts habiles : certains de leurs phrases, attitudes, regards, parfums, absences…, restent gravés dans nos mémoires, à jamais – mais comment font-ils ? Et il y a paraît-il des morts heureux, à qui l’on offre la trajectoire qu’ils avaient rêvée pour nous. Nous, vivants, donnons aussi aux morts. A chacun son langage : des fleurs, un portrait dans le salon, une larme dans le métro, une évocation en famille, un indicible manque. En Océanie, ils portent des masques pour entrer en communication avec eux. Puissant.
Faut-il être craintifs de l’au-delà, et arc-boutés sur nos vies de passage, pour ne pas sentir ce lien ! Sur le patchwork des photos de gens aimés, je mêle vivants et morts. Après tout, quelle différence ?