« Une île pleine de douleurs qui porte le poids de l’indifférence du monde. » Cette banderole, humble et triste, flotte dans la rue principale de Lampedusa, petite île italienne accrochée au Sud de la Sicile, mouillant à moins de 200 km des côtes tunisiennes. Depuis 25 ans, ce bout de terre paradisiaque est l’une des portes d’entrée des Africains rêvant d’Europe. Embarcations de fortune pleines comme un œuf, liaisons nocturnes pour échapper aux garde-côtes, mafia des passeurs (la 3ème au monde, après celles de la drogue et des armes) : l’aventure est aussi périlleuse qu’une croisière sur le Costa Concordia. On ne compte plus les milliers de noyés gisant dans la Cruelle Bleue. Il faut un bon gros naufrage, la semaine dernière, avec plus de 300 morts, principalement des Somaliens et des Erythréens, pour que les télés se penchent sur le malade. On ne le répète jamais assez : les accidents de voiture en France, les médias « prennent » à partir de trois morts ; les naufrages de migrants miséreux, c’est par paquets de 300 ; les accidents de trains en Inde ou les usines textiles qui s’effondrent au Bangladesh, on s’en fout.
Cette pression médiatique oblige le pape François à réagir. « C’est une honte », proclame-t-il sous les applaudissements convenus, oubliant un peu vite que l’Eglise catholique a joué et joue un rôle actif dans la surpopulation et la surnatalité en Afrique, évangélisant de force d’abord, puis interdisant ensuite la contraception et l’avortement. Côté non-spirituel, Jean-Marc Ayrault appelle de ses voeux une réunion des responsables européens. La belle affaire. On sent bien la difficulté, pour tout le monde, d’assumer une contradiction entre, d’une part, la défense d’un espace de libre-échange (Schengen) et, d’autre part, la construction d’une muraille hérissée de barbelés aux frontières de cet espace.
Car on en est là. Des pays comme l’Espagne et la Grèce ont, en lien avec l’agence Frontex, radicalisé leur lutte contre les migrants de l’extrême. Le nombre des immigrés clandestins est d’ailleurs en retrait ces dernières années sur ces points d’entrée. Le chantier ne fait que commencer : clarifier le statut de Lampedusa (que faire, juridiquement et humainement, de ces vagues d’immigrés ? comment arrêter les passeurs ?) ; verrouiller la frontière-gruyère de la Croatie, nouvel adhérent à l’Union Européenne, et qui ouvre une brèche de 1 300 km de forêts et de montagnes ; développer économiquement les foyers d’immigration pour contenir le phénomène, via le micro-crédit en particulier. D’ici à 2050, il faudra aussi trouver le moyen d’endiguer des flots de réfugiés climatiques, annoncés par les experts du Giec. L’Europe de nos vieux jours, une zone militarisée aux gardes-frontières armés jusqu’aux dents ? Etonnant qu’aucun producteur n’en ait pas déjà fait un film.
« Frontex », c’est super vendeur, comme titre.
« Cette pression médiatique oblige le pape François à réagir… »
Ah bon? Donc le méchant pape n’a réagi qu’à cause de la « pression médiatique »?
« L’Eglise catholique a joué et joue un rôle actif dans la surpopulation et la surnatalité en Afrique, évangélisant de force d’abord, puis interdisant ensuite la contraception et l’avortement »
Ah oui? Donc les migrants qui se noient c’est à cause de la méchante église catholique qui a converti de force les pauvres africains et leur interdit la contraception…(D’ailleurs chacun sait que la Somalie et l’Erythrée sont « surpeuplées », et de la faute de l’église catholique!). Anticléricalisme convenu ou paresse intellectuelle?
Pour finir l’humour beauf-canal »l’aventure est aussi périlleuse qu’une croisière du Costa Concordia » et « Frontex , c’est super vendeur », et quelques considérations banales qui donnent bonne conscience (développer le micro-crédit…)
Voila comment faire un billet inutile, qui prétend s’indigner du phénomène médiatique tout en s’y complaisant…
A tout prendre, je préfère la sincérité de la réaction du pape (et de quelques autres êtres humains qui l’ont saluée…)
Hubert Vialatte nous avait habitué à mieux
Misérable réponse d’un lecteur piqué au vif par l’anticléricalisme supposé de notre journaliste.
Le problème fondamental de la réaction du pape, c’est qu’elle ne sert à rien, si ce n’est à faire entendre l’institution qu’il représente (bien mal) en assénant une telle banalité de propos. Une pure posture, inutile. Aucune proposition de fond. Pas même celle de promouvoir, enfin, l’usage du préservatif (ce qui effectivement réduirait un peu la natalité en Afrique). Consternant.
Car qu’est-ce qui est vraiment honteux ? Que des nécessiteux meurent noyés ? Vraiment ? Je dirais que c’est plutôt une évidence: quand on monte à 50 dans un zodiaque sans savoir nager pour traverser plusieurs centaines de kms de mer, c’est en général ce que les lois de la physique newtonienne et celles de la statistique prévoient… Et comme le pape n’est pas Jésus, pas de miracle mais beaucoup de honte…
Ce qui me paraît bien plus honteux, n’en déplaise à Maître François, c’est que l’on (les institutions européennes comme les états Africains ou les représentants religieux) ne communique pas plus et pas mieux en Afrique pour effacer ce stupide mirage de l’eldorado européen des esprits aventureux. A commencer par l’Église, si elle veut sauver quelques uns de ses fidèles promis à une existence sous-marine prochaine…
Pour le reste, que faire ? Proposer à François de sillonner la Méditerranée pour servir de guide et flambeau à tous ces infortunés chercheurs d’or ? Construire une deux fois huit voies au-dessus de la mer pour rapprocher les continents de manière plus sécurisée ?
En revanche, le micro-crédit, oui ça peut marcher, en tout cas en Asie centrale et dans le sous-continent indien, c’est en plein boom. Mais François ne doit pas connaître, de même que Giaflor ne semble pas se souvenir des financements catastrophiques de l’Afrique par l’Occident et la France en particulier entre la fin de la décolonisation et le règne de Jacques 1er (Chirac): des dictateurs sans foi ni loi, des armées corrompues au service de quelques familles, de somptueux palais, etc. Vous connaissez ? Pour ma part, j’ai eu l’occasion de découvrir une petite partie émergée de l’iceberg quand je travaillais dans un service de livraison de l’ouest parisien: quelques descendants de ces heureux bénéficiaires des giga-allocs à la française se faisant livrer de délicats mets dans de superbes demeures au Trocadéro, avenue Foch, l’Ile de la Jatte, j’en passe et des meilleurs…
Quant à la surpopulation, elle ne se mesure pas à la densité par habitant dans un pays mais à la capacité d’un territoire à subvenir aux besoins basiques en habitat et en alimentation à ses occupants, éventuellement à sa capacité à générer des emplois pour cette population. Donc oui, la corne de l’Afrique est surpeuplée.
A tout prendre, je préfère l’efficacité du chavirage des embarcations de fortune comme réponse à la surpopulation d’une planète bientôt complètement déréglée…
Les lecteurs nous avaient habitués à mieux…